Un pèlerinage plein d’émotion pour les fidèles mourides

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Un pèlerinage plein d’émotion pour les fidèles mourides

Ils sont venus, ils sont tous là. Les fidèles mourides sénégalais se pressent actuellement vers le Gabon, et plus particulièrement vers la ville de Touba. En effet, c’est dans cette ville qu’a vécu le fondateur de la confrérie des mourides, le Cheikh Ahamdou Bamba. Ce voyage porte un nom quasi-magique, qui résonne aux oreilles de tous: le Grand Magal. Ainsi, ce voyage est d’une très grande importance religieuse, et chacun se doit d’être à la hauteur de l‘événement. Beaucoup de fidèles mourides vont ainsi partir camper pas moins d’une semaine au Gabon, le cœur et l’esprit loin de leur Sénégal natal. A peine arrivés au Gabon, bon nombre de fidèles ont laissé exprimer leur joie d’être arrivés à bon port. Dans la capitale de Libreville, où le Cheikh Ahamdou Bamba a également vécu en exil, les membres de la confrérie, exaltés et heureux, ont déjà commencé à se retrouver, sourires aux lèvres et vêtements de fête de rigueur. Ils portaient des banderoles, levant haut le portrait de leur fondateur bien-aimé. Après les rassemblements en France et au Canada, c’est en effet la première fois que la communauté de fidèles se rassemble à l’endroit exact où leur guide spirituel a vécu ses années d’exil et de solitude. L’occasion pour beaucoup de se souvenir et de célébrer la vie, loin des polémiques stériles et des discussions politiques.

Car derrière les joies des retrouvailles et le plaisir de défiler ensemble, il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit, avant toute chose, d’un événement hautement symbolique. Car c’est bien le régime colonial français qui a ordonné, en 1895, la déportation du Cheikh Ahamdou Bamba, depuis sa patrie sénégalaise. Par machiavélisme bien sûr, mais également par peur de l’influence de plus en plus importante que ce Cheikh charismatique, combatif et très critique envers le système instauré par la France dans les pays qu’elle contrôlait, prenait alors. L’objectif des colons était infiniment cruel, car c’était évidemment celui de le voir mourir en exil, loin des siens et de ses fidèles. Mais l’Histoire en a voulu autrement, puisque Cheikh reverra finalement son pays, après sept ans d’éloignement forcé. Maintenu prisonnier au Gabon, notamment à Libreville, le Chekih a su rester très actif, notamment en contribuant à la création d’une des premières mosquées de la ville. Mais il faut également souligner que le Cheikh a beaucoup voyagé au Gabon, et a tissé des liens d‘importance avec ce pays. Preuve de l’importance de cet enjeu commémoratif, le petit-fils d’Amadou Bamba est lui aussi du voyage, et l’on peut également compter sur la présence du Président du comité d’organisation du Grand Magal, structure qui réunit des fidèles du monde entier, en particulier venant de France et des Etats-Unis. Enfin, signe des temps, c’est bien à Libreville qu’ils ont choisi de débuter le pèlerinage, là où, fait exceptionnel, le modeste puit où le Cheikh faisait ses ablutions quotidienne existe toujours, entretenu et jalousement préservé par des fidèles sénégalais.

Puis, les fidèles voyageront sur les traces du Cheikh dans d’autres villes où il a résidé, comme Port-Gentil et Mayumba, cités qui peuvent se targuer, insigne honneur, de l’avoir accueilli dans la douleur de l’exil. Enfin, les marcheurs feront, non sans émotion, quelques pas dans la forêt amazonienne, où Amadou Bamba a vécu, entre 1895 à 1902. Ainsi, pour tous les pèlerins, il ne fait nul doute que ce voyage sera chargé d’émotion, et que beaucoup d’entre eux en reviendront changés. C’est un pèlerinage de paix et d’amour, et les mourides l’ont scandé depuis leur arrivée dans les rues de Libreville et il est fort à parier qu’ils le scanderont encore longtemps, tant l’admiration pour celui qui ne reverra les côtes de son Sénégal adoré qu’en 1927 est vivante et vibrionne dans tous les cœurs de ceux qui croient en lui et en sa force.

Journaliste reporter d'images en Afrique centrale pour la télévision française, François Jamet couvre également l'actualité à l'écrit, dans les colonnes de grands médias. En plus de ces activités, il est aujourd'hui rédacteur en chef de le-gabon.net.

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